Comprendre la situation juridique de la zone côtière au Costa Rica et l’accès libre aux plages du Costa Rica

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La zone maritime-terrestre est la bande côtière s’étendant de la ligne de hautes eaux (ligne de pleamar) jusqu’à 50 mètres à l’intérieur des terres. En droit costaricien, cette zone fait partie du domaine public, ce qui signifie qu’elle est inaliénable, imprescriptible et réservée à l’usage collectif de tous les citoyens.

Le principe du domaine public garantit qu’aucun particulier ou entité privée ne peut s’approprier, clôturer ou obstruer cette bande. Sa protection assure l’accès piéton libre au rivage, préserve les valeurs environnementales et confirme le droit à un environnement sain tel que prévu par la Constitution.

2. Cadre juridique principal

Le régime côtier du Costa Rica repose sur un ensemble hiérarchisé de lois et de dispositions constitutionnelles qui définissent le domaine public, répartissent les compétences et prévoient des sanctions en cas d’infraction.

2.1 Loi sur la zone maritime-terrestre (Loi n° 6043 de 1977)

  • Art. 1 : Déclare que les 50 premiers mètres, mesurés depuis la ligne de hautes eaux, sont « domaine public et inaliénables ».
  • Art. 2 : Interdit toute « construction, clôture ou obstacle » entravant la libre circulation dans cette bande.
  • Art. 4 : Prévoyait sanctions administratives (amendes, remise en état) pour les infractions.
  • Règlement (Décret 15176-AA-MAG) : Précise les méthodes topographiques de délimitation, les normes techniques des relevés et les procédures de certification officielle.

2.2 Constitution politique du Costa Rica (réforme 1949)

  • Art. 50 : Garantit à toute personne le droit de vivre dans un « environnement sain », fondement constitutionnel de la protection côtière.
  • Art. 121 : Affirme la suprématie de la Constitution et impose à l’État la garde des biens publics, dont fait partie la zone maritime-terrestre.

2.3 Code civil (Loi n° 136 de 1887)

  • Art. 657 : Décrit les « biens du domaine public » comme ceux destinés à l’usage général de la communauté, incluant les rivages et cours d’eau navigables.
  • Art. 658 : Déclare ces biens « inaliénables et imprescriptibles », renforçant l’inviolabilité de la bande côtière.

2.4 Loi générale de l’administration publique (Loi n° 6227 de 1978)

  • Art. 12 : Autorise les ministères (dont le MINAE) à surveiller, contrôler et conserver les biens relevant du domaine public.
  • Art. 30 : Confère aux municipalités le pouvoir de prendre les mesures nécessaires (signalisation, entretien, enlèvement d’obstacles) pour garantir la libre circulation sur leur territoire.

3. Acteurs et compétences

Le régime côtier costaricien répartit les responsabilités entre plusieurs instances publiques et encadre strictement le rôle des particuliers et concessionnaires afin de préserver le caractère public de la frange littorale.

3.1 Organismes publics

  • MINAE (Ministère de l’Environnement et de l’Énergie)
    • Délimitation et conservation : Conformément à l’article 3 de la Loi n° 6043, la Direction des Aires Marines et Côtières réalise les levés topographiques officiels, rédige l’acte technique fixant la limite des 50 m et surveille la préservation de la zone.
    • Contrôle environnemental : En vertu de l’article 12 de la Loi générale de l’administration publique (n° 6227), le MINAE peut sanctionner administrativement toute infraction au régime de la zone maritime-terrestre.
  • Municipalités
    • Signalisation et entretien des accès : D’après l’article 5 de la Loi 6043 et l’article 30 de la Loi 6227, chaque municipalité doit aménager au moins trois accès piétons par plage, veiller à leur bon état et garantir l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite (Loi n° 7600).
    • Intervention en cas de blocage : Selon l’article 43 de la Loi organique des municipalités (n° 7794), elles peuvent ordonner la suppression des clôtures ou obstacles illégaux et, si l’ordre n’est pas exécuté, en faire réaliser la levée à frais communaux imputés au contrevenant.
  • Autres entités sectorielles
    • Institut Costaricien du Tourisme (ICT) : Délivre et contrôle les servitudes d’accès à usage touristique, en veillant à ce qu’elles n’empiètent pas sur les 50 m du domaine public (Décret 36822-MICT).
    • Garde-côtes et forces de l’ordre : Soutiennent la surveillance des plages et la dénonciation des infractions, conformément aux dispositions pénales de protection du littoral (Loi n° 8071).

3.2 Particuliers et concessionnaires

  • Usages autorisés : Les propriétaires riverains ne peuvent établir que des servitudes de passage légères et réversibles, préalablement autorisées par le MINAE ou l’ICT (Loi 6043, art. 6 ; Code civil, art. 659).
  • Interdictions : Toute clôture, construction ou tout aménagement situé dans les 50 m de la ligne de pleamar est nul et de plein droit (Loi 6043, art. 2 ; Code civil, art. 658).
  • Concessions temporaires : Les concessions touristiques ne transfèrent pas la propriété et expirent selon leurs termes, avec obligation de restituer la zone à l’état naturel (Décret 36822-MICT).
  • Sanctions : Les contrevenants s’exposent à des amendes de ₡100 000 à ₡5 000 000 (Règlement de la Loi 6043, art. 4), à la démolition des ouvrages illégaux et à des poursuites civiles pour dommages et intérêts (Code civil, art. 2229 et suivants).

4. Processus et procédures

Les processus administratifs et techniques garantissent une délimitation précise, la création et l’entretien des accès, ainsi qu’une réponse efficace en cas de blocage illégal.

4.1 Délimitation et mesurage

  • Base légale : Loi 6043, art. 3 ; Décret 15176-AA-MAG (Règlement).
  • Étapes :
    1. Demande de levé : Initiée par le MINAE, la municipalité ou un riverain.
    2. Relevé topographique : Réalisé par un géomètre habilité, utilisant GPS géodésique et station totale.
    3. Acte technique : Document signé précisant les coordonnées UTM, croquis et limites des 50 m.
    4. Enregistrement et notification : Inscription au Registre public de la propriété et communication aux parties concernées.

4.2 Création et entretien des accès

  • Base légale : Loi 6043, art. 5 ; Loi 6227, art. 30 ; Loi 7794, art. 43 ; Loi 7600.
  • Exigences :
    • Nombre : Minimum trois accès piétons par plage.
    • Dimensions : Allure minimale de 1,5 m de large, dégagée de tout obstacle.
    • Accessibilité : Rampes et signalisation conformes aux normes d’accessibilité pour personnes handicapées.
  • Maintenance : Inspections semestrielles, dégagement de végétation et réparation après événements naturels (délai de restitution : 30 jours).

4.3 Intervention en cas de blocage

  • Base légale : Loi 6043, art. 2 ; Constitution, art. 169 ; Loi 7794, art. 43 ; Décret 15176-AA-MAG.
  • Procédure :
    1. Signalement : Tout citoyen peut alerter la municipalité ou le MINAE.
    2. Ordre municipal : Notification écrite accordant 15 jours ouvrables pour lever l’obstacle.
    3. Vérification de suivi : Contrôle à l’échéance du délai.
    4. Exécution forcée : Si persistance, la municipalité fait intervenir une entreprise pour enlever l’obstacle, à la charge de l’auteur.
  • Sanctions : Amendes (₡100 000–₡5 000 000) et remise en état du domaine public.

5. Recours et sanctions

Les usagers de la zone maritime-terrestre disposent de voies de recours tant administratives que judiciaires pour faire lever les entraves et obtenir réparation.

5.1 Recours administratifs

  • Base légale : Loi n° 6043, art. 7 ; Loi générale de l’administration publique n° 6227, arts. 30 et 59 ; Code de procédure administrative n° 7355, arts. 22–25.
  • Recours en rétractation
    • Objet : Contester une décision municipale refusant l’accès ou imposant des conditions illégales.
    • Délai : 15 jours ouvrables à compter de la notification (art. 22 Code 7355).
    • Autorité compétente : La même municipalité ayant pris la décision initiale.
  • Recours en appel
    • Objet : Contester la réponse au recours en rétractation ou tout acte administratif final.
    • Délai : 15 jours ouvrables à partir de la notification de la décision de rétractation (art. 23 Code 7355).
    • Autorité compétente : Gouverneur de province ou Direction juridique du MINAE, selon le règlement de la loi 6043.
  • Effet suspensif
    • Sur demande motivée, le recours peut suspendre l’acte attaqué, empêchant toute remise en place de l’obstacle durant l’instruction (art. 25 Code 7355).

5.2 Actions judiciaires

  • Habeas corpus / Amparo
    • Base légale : Constitution, art. 48 ; Loi n° 7135.
    • Objet : Obtenir en urgence la protection du droit à un environnement sain (art. 50 Cst.) et l’accès libre à la côte.
    • Mesure provisoire : Ordre immédiat de levée de l’obstacle par la Sala IV avant jugement de fond.
  • Contrôle de constitutionnalité
    • Base légale : Constitution, art. 85 ; Loi n° 7135.
    • Objet : Faire déclarer inconstitutionnels des actes municipaux ou des règlements contraires à la Constitution ou à la loi 6043.
  • Recours contentieux administratif
    • Base légale : Code de procédure administrative n° 7355, arts. 1, 4 et 11.
    • Objet : Contester devant le Tribunal administratif tout acte ou omission violant le régime de la frange littorale.
    • Délai : 2 mois à compter de la notification ou de la connaissance de l’acte (art. 4 Code 7355).
  • Sanctions et réparations
    • Amendes : ₡ 100 000 à ₡ 5 000 000 selon le règlement (Décret 15176-AA-MAG, art. 4).
    • Démolition et restitution : Obligation de retirer à ses frais tout ouvrage illégal (loi 6043, art. 2 ; Code civil, art. 658).
    • Dommages-intérêts : Possibilité de réclamer en justice compensation pour préjudice matériel et moral (Code civil, arts. 2229 et suiv.).

6. Étude de cas : Punta Leona

Cet exemple illustre la mise en œuvre pratique du régime juridique de la frange littorale.

6.1 Incident
Au début de 2024, les exploitants du complexe privé de Punta Leona (cantón de Garabito) ont érigé une clôture métallique de 2 m de haut et accumulé du sable pour bloquer l’accès à Playa Blanca et Playa Mantas, deux secteurs situés dans les 50 m du domaine public.

6.2 Réponse municipale

  1. Signalement : Des riverains et des usagers ont déposé une plainte auprès de la municipalité, évoquant l’article 2 de la loi 6043.
  2. Ordre officiel : La Municipalité de Garabito a ordonné, sur le fondement de l’art. 43 de la loi 7794, de retirer la clôture et les amas de sable sous 15 jours ouvrables.
  3. Vérification : À l’expiration du délai, les inspecteurs ont constaté la persistance du blocage.
  4. Exécution forcée : La municipalité a engagé une entreprise de terrassement pour enlever les obstacles, refacturant l’opération au concessionnaire.

6.3 Fondement légal

  • Domaine public inaliénable : Loi 6043, art. 1–2.
  • Droit à un environnement sain : Constitution, art. 50.
  • Compétence d’exécution forcée : Loi 7794, art. 43.

6.4 Résultats et enseignements

  • Accès rétabli : En moins de 48 heures, les plages ont été rouvertes au public.
  • Responsabilité financière : Les coûts de déblaiement ont été imputés au propriétaire privé.
  • Efficacité de l’action publique : La coordination entre municipalité, MINAE et forces de l’ordre a confirmé la vigueur du cadre légal et dissuadé toute future tentative de privatisation.

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